Né en Toscane en 1743 et contemporain de Haydn, Luigi Boccherini partage avec le maître autrichien le même style galant, mais tandis que la mémoire collective n’a pas oublié le premier, elle a par contre du mal à se souvenir du second. Ce n’est donc que très progressivement que se construit autour de son nom une discographie digne de son écriture. Fort heureusement, le disque présent va venir y prendre place. Bien que l’Ensemble Alea ne soit pas encore très connu dans le milieu artistique, ce n’est pas pour autant un groupe de débutants. Réunissant les principaux musiciens d’Europa Galante et d’Accademia Bizantina, c’est sur des instruments authentiques qu’il exécute les six Quatuors à cordes, op. 2 : de purs chefs-d’œuvre, tant pour leur originalité que pour leur beauté intrinsèque. Boccherini n’a pas encore vingt ans lorsqu’il les compose, mais malgré cela, ces pièces portent déjà sa griffe. Des caractéristiques qui sont ici, on ne peut mieux définies : une instrumentation limpide et délicate, des lignes mélodiques aux motifs lentement exposés, une texture douce et légère et, comme toujours chez ce compositeur, une tendance au naturel et une spontanéité qui rendent sa musique si attachante. Tels de précieux hyménoptères, nos quatre interprètes viennent y prélever le nectar, l’auditeur n’ayant plus, ensuite, qu’à se régaler de leur miel. Ajoutons que le travail de l’ingénieur du son est lui aussi à citer en exemple. Le spectre sonore est étendu et reproduit fièrement une palette de timbres jamais prise en défaut, avec ce qu’il faut de mordant, de finesse et de transparence. Pour la deuxième fois enregistré, cet opus sera pour la plupart d’entre nous une découverte et par la même occasion, une excellente surprise. Un disque rare et une pierre supplémentaire dans un édifice boccherinien qui ne demande qu’à gagner en hauteur. À ne surtout pas manquer.

T. HERVÉ - 06/2008