Rassembler sur le même disque des œuvres de Felix et Fanny Mendelssohn est devenu, au fil du temps, un fait de moins en moins rare. Il y a deux ans, c’est le Trio Vivente qui enregistrait pour le label Raumklang un programme de musique de chambre qui nous ravit encore aujourd’hui (voir ici). Toujours dans le même genre, la bonne surprise provient cette fois de Genuin Classics – un autre éditeur allemand – et du Merel Quartet, une formation basée à Zurich, connue pour la diversité de son répertoire. Là encore, comment ne pas applaudir cette heureuse initiative, tant ses protagonistes semblent tout avoir compris de l’esprit qui habite ces œuvres ? Bien organisé, leur jeu se signale aussi par une constance rythmique et par un style d’une grande homogénéité. Qu’importe la nature des passages, qu’elle soit introspective, telle la Fugue en mi bémol majeur (l’un des quatre mouvements libres de l’opus 81), ou plus expressive, tel l’Allegro vivace assai qui ouvre le Quatuor en fa mineur, op. 80 (la dernière œuvre achevée de Felix Mendelssohn), le Merel Quartet se montre efficace en toutes circonstances. Dans cette pièce composée en réaction au récent décès de sa sœur, nos Zurichois traduisent parfaitement bien la colère et la détresse du compositeur – cette dernière finissant par l’entraîner dans la mort quatre mois plus tard –, alors que dans l’Adagio, c’est bien toute la profondeur et la tristesse d’une réflexion endeuillée qu’il nous livre. À peine moins élaboré que ceux de son frère, le Quatuor en mi bémol majeur de Fanny Hensel (nom d’épouse) ne nuit en rien à la réputation familiale, bien au contraire. Ainsi, chacun saura apprécier à travers son écoute le fruit d’une excellente éducation musicale et l’expression d’un vrai talent de compositrice, son esprit et sa sensibilité n’étant pas en reste. À destins tragiques, disque magique !

T. HERVÉ - 06/2011