Musique à l’esthétique romanesque et foncièrement poétique, hermétique aux modes mais néanmoins attachée à son temps, l’œuvre de Medtner vient compléter notre connaissance de la musique russe du XXe siècle d’une bien belle façon. À peine avons-nous eu le temps d’assimiler l’excellente gravure prodiguée par Ekaterina Derzhavina (voir ici), que déjà Boris Berezovsky nous offre son concours, mais là où la pianiste russe se réservait l’exclusivité de son enregistrement, son compatriote, quant à lui, décide d’y associer deux voix aux tessitures diamétralement opposées : la soprano Yana Ivanilova, et la basse Vassily Savenko. Pour ce faire, son programme s’articule, pour une moitié, autour de pièces pour piano seul (les Contes), et pour l’autre, de mélodies (les Poèmes) où le pianiste accompagne, tour à tour, l’un et l’autre chanteur. Faut-il y voir la marque d’un patriotisme dopant ? Toujours est-il que chacun y va de sa propre verve, promouvant ainsi le compositeur au grade d’inspirateur divin. Un peu comme si les idées se bousculaient dans sa tête, la spontanéité de son écriture trouve son aboutissement dans la brièveté de sa forme. Avec l’éloquence et la poésie en gage de qualité, cette musique n’a décidément pas fini de nous étonner. On connaissait depuis longtemps le profond attachement de Berezovsky pour Medtner ; avec ce disque, nous sommes désormais avertis de son caractère contagieux. Du Russe, en veux-tu ? En voilà !

T. HERVÉ - 03/2009