Alors qu’il inaugurait son contrat chez Astrée, en 1975 Jordi Savall enregistrait avec Ton Koopman et Arianne Maurette, les Suites de violes de François Couperin. Ce fut à l’époque une véritable révélation. Cependant, il fallut attendre 1992 et la version de Wieland Kuijken (Accent) puis celle de Nima Ben-David (Alpha) en 2000 pour pouvoir déguster, de nouveau, ces splendeurs musicales. Aujourd’hui, c’est Philippe Pierlot qui nous replonge dans cet univers à l’inspiration si profondément humaniste. Pour ce faire, il s’est entouré de musiciens réellement exceptionnels, dont les connaissances intimes et les capacités artistiques transpirent ici de manière incontestable. À eux quatre, ils nous servent un Couperin en état de grâce : profond, mélancolique, émouvant, céleste et spirituel. La tiédeur et les sombres sonorités des violes nous projettent dans les pensées douces-amères d’un immense compositeur au soir de sa vie. Cela dit, ce n’est pas une musique funeste, car, si elle comporte bien quelques traits d’humilité et de tristesse, elle est joliment articulée et très souvent déridée par des pointes de panache qui lui confèrent une apparence sereine et attirante. En écoute comparée, cette version affiche indéniablement ses qualités. Au final, Ben-David tremble, Savall fléchit, Kuijken succombe. Ajoutons que le livret de présentation est fort instructif et que la captation d’Aline Blondiau participe grandement à la réussite de ce disque enchanteur.
T. HERVÉ - 09/2008