Allons, du calme. Surtout, ne nous laissons pas corrompre par l’impression visuelle ressentie devant Janine Jensen. Oublions, du moins le temps de la critique de ce disque, son regard félin et son sourire malicieux pour nous concentrer sur l’essentiel, à savoir le Concerto pour violon, op. 64 de Felix Mendelssohn, puis le Concerto pour violon n° 1, op. 26 et la Romance, op. 85 de Max Bruch. Commençons par dire que ces deux pièces concertantes sont au rang des plus jouées et des plus enregistrées, et qu’en ce domaine, les références ne manquent pas. Dans le même couplage, Maxime Vengerov, pour ne citer que lui, y a laissé une empreinte indélébile. Son enregistrement de 1993 sous la direction de Kurt Masur à la tête du Gewandhaus Orchester de Leipzig a marqué au fer rouge le cœur des mélomanes. Presque quinze ans plus tard, nous voici donc confrontés au même orchestre (celui-là même qui joua pour la première fois le Concerto pour violon, op. 64 de Mendelssohn), mais cette fois-ci, placé sous la baguette de Ricardo Chailly et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’avec le temps, son pouvoir de séduction ne s’est pas démenti. Sa somptueuse sonorité le place d’office parmi les plus prestigieuses formations. Sa transparence laisse percevoir l’équilibre souverain atteint par le charismatique chef italien. Il offre à la belle jeunette et à son Stradivarius Barrere de 1727 le relief nécessaire à leur émancipation. Magnifique d’aisance dans la phrase grâce à une diction parfaite, pas une ligne, pas une respiration, pas une nuance qui ne soit un aboutissement, une consécration de sa prodigieuse maîtrise musicale. Indubitablement, et au-delà de toute influence physique – je le jure –, ce disque ne manque pas d’atouts. Une fois encore, le Gewandhaus Orchester marque de son sceau royal ces œuvres fondamentales du répertoire pour violon. À vous maintenant de succomber aux charmes... de cette musique.
T. HERVÉ - 07/2007