Alors que de trop nombreux disques de lieder ne sont que des étals vides, celui-ci nous offre tout ce que nous sommes en droit d’attendre d’un tel exercice. Et c’est un véritable numéro de funambule auquel se livre la regrettée Lucia Popp. Bien campée sur le fil harmonique tendu entre Brahms d’un côté, qui emprunte la mélodie à la poésie, et Mahler de l’autre, pour lequel l’élément populaire demeure une puissante source d’inspiration, elle semble se libérer de toute attraction terrestre. Outre un sens de l’équilibre depuis longtemps acquis, elle possède un tissu de voix aux teintes et aux nuances qui, sans avoir l’air de forcer, transmettent les émotions et traduisent bien les changements de paysages sonores. Il n’en serait pas ainsi sans la remarquable participation de Geoffrey Parsons. Familier de ce répertoire, son piano est un véritable balancier pour la soprano. Il souligne chaque couleur et chaque nuance de la partition, ce qui, dans ce contexte émotionnel, n’est pas un mince exploit. Le livret ne mentionne malheureusement pas le lieu précis de l’enregistrement, mais l’ingénieur du son a bénéficié d’une très belle acoustique, dont il a su tirer profit. L’ensemble sonne naturellement et avec une grande cohérence. Pour peu que l’on traite ce disque avec tous les égards dus à son rang, on se voit récompensé au centuple des attentions consenties.
T. HERVÉ - 03/2007