Parmi tous les recueils de madrigaux écrits par Claudio Monteverdi, seul le Sixième Livre ne comporte pas de dédicace ; comme si personne n’en eut été digne. Pour se prévaloir d’une telle source, ne faudrait-il pas accumuler autant de qualités que même le plus vaniteux des hommes peinerait à les imaginer ? Convaincu de la fragilité de l’équilibre entre l’amour et la mort, le compositeur l’exprima à sa façon, par des jeux d’ombres et de lumières, créant une atmosphère mélancolique et poétique, propice à la réflexion. Figure de proue du Concerto Italiano, Rinaldo Alessandrini établit, lors de la sortie de ce disque en 1992, un nouveau standard dans l’exécution madrigalesque. Attentif à ne pas déshumaniser la partition, il obtient de ses chanteurs une précision et une densité en tous points remarquables, chaque partie de l’œuvre se différenciant des autres en fonction de ses aspirations thématiques. Avec ce volume, Monteverdi rédigea un chapitre important de l’histoire de la musique, celui qui, encore imprégné de la polyphonie traditionnelle, introduisait progressivement la monodie accompagnée. Quant à Alessandrini, il signa là un de ses premiers succès discographiques qui allaient, dès lors, s’enchaîner. Pour l’un comme pour l’autre, cette réédition d’un grand classique du label Arcana doit s’inscrire immédiatement sur votre prochaine liste d’achats avant qu’il ne soit plus disponible et que vous vous en mordiez les doigts.

T. HERVÉ - 02/2007