Alors que les spécialistes considèrent l’œuvre sacrée du XVe siècle comme l’un des signes les plus significatifs des mutations opérées par cette époque, elle reste pour la plupart des esprits non initiés un symbole de rigueur et d’austérité. Pourtant, c’est bien d’un noyau culturel et artistique en pleine effervescence qu’elle puise son inspiration, et même si les règles imposées par la fermeté ecclésiastique sont toujours en vigueur, c’est avant tout du génie de ses compositeurs qu’elle se réclame. Parmi les ensembles qui lui sont actuellement inféodés, Cantica Symphonia est de ceux qui militent pour l’utilisation d’instruments dans la musique sacrée médiévale, dès lors que leur usage participe à sa compréhension, cela, bien sûr, en conformité avec les usages de son temps. Ainsi traité, nul besoin d’être un adepte forcené de l’art polyphonique d’Antoine Busnois pour apprécier pleinement leur nouveau disque. Avec une petite dose de bonne volonté et un peu d’attention – un minimum s’impose quand même –, l’auditeur devrait pouvoir accéder à ces petits chefs-d’œuvre un peu plus facilement que de coutume. Prenant pour référence la chanson L’Homme armé – un « tube » de la fin du Moyen Âge –, ces fragments de messes sont à l’image des pièces de verre qui composent les vitraux des cathédrales dans lesquelles elles s’épanouissaient jadis, chaque voix participant en raison de sa position, de sa couleur et de sa transparence à une représentation d’une grande harmonie. Soigneusement serties par Giuseppe Maletto, écoutées à un niveau raisonnable et dans des conditions optimales, elles apporteront à celui qui est capable de les considérer, un sentiment de sagesse et de maturité que bien peu d’expériences sonores sont capables d’offrir.

T. HERVÉ - 01/2010