Rapportés au contexte de leur époque, ces deux concertos pour clavier sont à l’opposé de l’étiquette « classique » dont on les affuble aujourd’hui. En cette fin de XVIIIe siècle, les arrangements se réclamant autant de l’audace, du charme, de la malice, du théâtre, de la virtuosité, du lyrisme et la beauté joviale et tragique, ne furent pas obligatoirement perçus dans leur totale dimension, sans doute parce que trop consistants ou trop en avance sur leur temps. Si, de nos jours, nous avons acquis une meilleure  faculté de discernement, c’est en grande partie en écoutant des disques comme celui-ci. Dès les premières mesures du Concerto en sol majeur, l’affaire est entendue. Attaché aux éminents services de l’Orchestre de Chambre de Lausanne, le pianiste-chef, Christian Zacharias, inscrit d’emblée son interprétation dans la liste de celles qui revendiquent une authentique compréhension de l’écriture mozartienne. Sans se départir de quelques formules de séduction, son travail s’inscrit sous le signe de la méticulosité, du respect et de la passion. Chaque pupitre bénéficie des mêmes soins, de la même considération. Avec le même entêtement, le Concerto en si bémol majeur, moins pudique, laisse passer les émotions dans la plus grande transparence ; la finesse du style n’ayant  d’égale que la beauté des sonorités qui l’accompagnent. Compte tenu de ses immenses qualités musicologiques, artistiques et techniques, ce disque fait partie des très bonnes surprises de ce début d’année. La musique de Mozart comme s’il en pleuvait.

T. HERVÉ - 02/2009