Fruit d’une rencontre inspirée entre une interprète géniale et un chef intrépide, ce disque célèbre le génie de Rossini, les principaux dénominateurs en étant la passion et le talent. Premièrement, on ne peut que plier sous l’effet de la voix de Julia Lezhneva, tant en l’écoutant tout semble aller de soi : la profondeur de sa tessiture, la clarté de son émission, la délicatesse de son timbre et la conduite quasi instrumentale de son chant. Outre le charme et la pureté de ce dernier, tout se prête merveilleusement bien à l’écriture du compositeur italien. Étonnante par son caractère supérieur sitôt affirmé (elle entame à peine sa troisième décennie), son premier récital enregistré ne limite pas au seul exercice de style. Douée d’un talent propre à faire vivre les mots, notre apprentie diva nous entraîne dans l’intimité vocale de ses héroïnes avec un art nourri de théâtre et de musique. Ajoutez à ce tableau déjà glorieux une simplicité et une élégance toute naturelle, et vous obtiendrez ce que l’art lyrique peut procurer de plus précieux : l’émotion. Secondement, il convient de saluer la mise en scène musicale de Marc Minkowski. Respirant au rythme de la partition, il intervient comme à son habitude avec une rare disponibilité. Ainsi, à supposer que le Sinfonia Varsovia ne soit pas la formation la plus prestigieuse de la scène internationale, sa prestation est d’un niveau qui ne supporte pas la critique, même si les auditeurs les plus pointus peuvent la juger, comparativement à celle de la jeune virtuose, sensiblement moins engagée. Malgré la beauté de son orchestre, Minkowski n’est donc pas le véritable triomphateur de cet album au lyrisme fou. Non, la vedette est russe et se nomme Julia Lezhneva. Aussi, ne vous fiez pas à l’image faussement candide qui orne la couverture de cet album. De toute évidence, ce récital rossinien ne doit rien au hasard. Il s’inscrit comme le premier d’une carrière que l’on imagine prodigieuse et fertile. D’ailleurs, son regard ne semble-t-il pas déjà se porter vers les sommets ?

T. HERVÉ - 04/2011