À trente-sept ans, le Néerlandais Léon Berben n’est pas à proprement parler un nouveau venu. Après avoir suivi un brillant apprentissage auprès de Bob van Asperen, de Ton Koopman et de Gustav Leonhardt – excusez du peu – il devient au début de l’année 2000 le claveciniste du Musica Antiqua Köln de Reinhard Goebel. Inféodé à un répertoire qui s’étend de 1550 à 1750, il voue une véritable passion à Jan Peterszoon Sweelinck, un compositeur et organiste célèbre à Amsterdam, dont l’œuvre pour clavier présente beaucoup d’affinités avec celles des virginalistes anglais. Il n’est donc pas étonnant de le retrouver à la tête d’un programme de pièces pour orgue du grand maître du clavier de l’Angleterre élisabéthaine, William Byrd. Évoquer cette musique consisterait à dire que son efficience repose sur sa pureté, et qu’elle ne doit en rien à la sophistication. Au contraire, elle est plutôt redevable à l’intelligence et à la sérénité qui lui octroient une juste place entre la rigidité et la liberté. Cela dit, ce programme est exempt de toute platitude. Comment pourrait-il ne pas en être ainsi avec l’éclairage que lui apporte Léon Berben ? L’organiste joue subtilement sur les contrastes de la musique, l’éclairant d’une lumière aux températures de couleurs d’une belle amplitude, mais sans excès ; la froideur et l’excentricité y étant pour toujours bannies. Aussi, en remettant son sort à la mécanique complexe de l’orgue historique de l’église d’Oosthuizen (l’un des plus anciens d’Europe), il lance le pari qu’en dépit de sa petite taille, l’instrument est capable d’afficher une palette sonore digne de l’écriture de Byrd. En cela, le résultat musical lui donne raison. D’ailleurs, la prise de son nous le confirme avec une excellente restitution, extrêmement juste et équilibrée, aérée et agréablement réverbérée. L’orgue dans sa Renaissance ou le XVIe siècle dans toute sa splendeur.
T. HERVÉ - 02/2008